Richelieu,
Bibliothèques - Musée - Galeries
Historique des collections
La Bibliothèque n’a pas toujours été telle qu'on la connaît aujourd’hui. Elle s’est construite au fil des siècles. Avant tout héritière des collections royales constituées depuis la fin du Moyen Âge, elle s’est développée dans l’idée de continuité mais aussi de renouvellement...
Elle a en effet su se moderniser jusqu’à devenir l’actuelle Bibliothèque nationale de France (BnF) – nom qu’elle prendra en 1994. Aujourd’hui, elle rassemble un total de 15 millions de livres et d’imprimés ainsi que plusieurs millions de périodiques correspondant à 390 000 titres, 250 000 manuscrits, mais également des cartes, estampes, photographies, monnaies, médailles, partitions, décors et costumes, objets et objets d’art, et des documents sonores, vidéos, multimédias, numériques ou informatiques…
​Tiziano VECELLIO dit TITIEN, Portrait de Charles V, vers 1550, huile sur toile, Musée d’Histoire de l’Art de Vienne / Wikimedia Commons.
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Au Moyen Âge, les rois de France constituent des collections de livres dont ils autorisent la consultation aux savants. Cependant, à leur mort, ces ouvrages sont dispersés, vendus au profit des pauvres ou d'institutions religieuses. Ce n'est que sous le règne de Charles V qu'apparaît l’idée d’une bibliothèque inaliénable, transmissible aux descendants du monarque. Charles V installe sa bibliothèque au Louvre, dans la tour dite de la Fauconnerie, en 1368. Un an plus tard, il crée l'office de garde de la librairie en faveur de Gilles Malet. C’est là le début d’une tradition que les rois de France ont ensuite à cœur de maintenir.
Guillaume REVEL, Charlotte de Savoie, XVe siècle, in « « Registre d'armes » ou armorial d'Auvergne, dédié par le hérault Guillaume REVEL au roi Charles VII, Paris, Bibliothèque nationale de France. Département des manuscrits. Français 22297
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La Librairie n’est pas dispersée à la mort de Charles V. Son fils Charles VI en hérite mais un relâchement se fait sentir : les oncles du roi, Louis, duc d’Anjou, et Jean, duc de Berry, empruntent des livres. Surtout, en 1424, pendant la guerre de cent ans, le duc de Bedford, régent du royaume, achète les manuscrits de la tour du Louvre qui sont transportés en Angleterre et dispersés à la mort du duc. Un petit nombre de manuscrits, acquis par les princes français de la maison d’Orléans durant leur captivité en Angleterre, est heureusement appelé à regagner la France quelques années plus tard. Les efforts de Charles V anéantis, il faut songer à reconstruire. Mais Charles VII est trop occupé à rétablir la paix pour consacrer beaucoup de temps à sa bibliothèque. Il faut donc attendre Louis XI pour voir les choses changer. Le roi est épris de culture italienne et possède de très beaux manuscrits. La deuxième femme de Louis XI, Charlotte de Savoie, possède une petite collection de manuscrits. Le plus précieux est le livre des Grandes Heures du duc Jean de Berry, qui possède encore à l'époque les grandes peintures de Jacquemart de Hesdin, aujourd'hui disparues. Charles VIII en héritera. La reine prend soin, à la mort du roi, de faire réserver pour son fils une partie des manuscrits de Louis XI. Grâce à Charlotte de Savoie, le problème de la dispersion des collections royales à la mort du roi s'achève enfin"
Jean DU TILLET DE LA BUSSIERE, Charles VIII L’Affable, 1580, in Recueil des Roys de France, 1566, Paris, Bibliothèque nationale de France, Département des Manuscrits. Français 2848.
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La brièveté du règne de Charles VIII, demeuré longtemps sous la régence de Pierre de Beaujeu, ne lui aurait pas permis d’enrichir sensiblement ses collections sans l’apport considérable des volumes rapportés lors de son équipée napolitaine. Charles VIII part à la conquête de Naples, en faisant valoir d’anciens droits dynastiques. Cette épopée napolitaine se termine mal, avec le retour du roi à Paris, mais Charles VIII parvient à faire transporter jusqu’au château d’Amboise toute une partie de la bibliothèque des rois aragonais de Naples (1140 volumes imprimés et manuscrits, latins, italiens, français, grecs, espagnols)…
Jean PERRÉAL, Louis XII, King of France, vers 1514, huile sur toile, Windsor, Collections de S.M. la Reine d'Angleterre / Wikimedia Commons.
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Louis XII, fils du poète Charles d’Orléans, donne naissance à la Bibliothèque du roi en réunissant en son château de Blois plusieurs éléments. Il hérite des livres de son père Charles d’Orléans, fait prisonnier à la bataille d’Azincourt en 1415, et emmené en captivité en Angleterre où il rejoint son frère Jean d’Angoulême. Pendant leurs 25 années de captivité, les deux frères avaient entrepris des travaux littéraires et en partie récupéré les livres pris par le duc de Bedford. Louis XII hérite de cette bibliothèque, à laquelle il adjoint celle de Charles VIII, son prédécesseur sur le trône. Louis XII rêve lui aussi d’Italie. En 1499, il conquiert le duché de Milan qu’il revendique au titre des droits qu’il tient de sa grand-mère, Valentine Visconti. A la faveur de cette expédition, le roi s’empare d’une grande partie de la belle bibliothèque formée par les Visconti et les Sforza au château de Pavie. L’entrée des collections napolitaine et milanaise accélère le mouvement de renaissance artistique et littéraire, déjà largement amorcé en France. La bibliothèque de Louis XII est ouverte aux savants - elle pratique dans certains cas le prêt des volumes - et aux visiteurs étrangers. Claude de Seyssel la juge « très magnifique et très singulière ». Ce sont les débuts de l’exploitation scientifique des fonds qui prendra un grand essor sous François Ier.
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Vers la fin des années 1520, François Ier décide de créer une nouvelle librairie royale - en parallèle de celle de Blois qui continue d’exister - qu’il installe à Fontainebleau, dans une galerie située au-dessus de celle du Rosso. Guillaume Budé est le premier maître de cette Librairie destinée à accueillir surtout des manuscrits grecs.
Jean CLOUET, François Ier, Roi de France, vers 1530, huile sur toile, Paris, Musée du Louvre, Base Joconde / Wikimedia Commons.
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Il instaure également, le 28 décembre 1537, le dépôt légal – qui enjoint aux imprimeurs et aux libraires de déposer à la librairie du château de Blois tout livre imprimé mis en vente dans le royaume. C’est une étape fondamentale pour la Bibliothèque Royale
Octave DE ROCHEBRUNE, Cour intérieure du château de Blois dessinée d’après nature, 1864, eau- forte, Paris, Bibliothèque nationale de France, Département des Estampes et photographie
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En 1544, il fusionne officiellement les deux bibliothèques de Blois et de Fontainebleau, c’est vraiment le début de la Bibliothèque Royale.
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Vers 1560, Charles IX la transfère à Paris, dans un endroit tenu secret pour qu'elle soit mieux protégée. En 1593, alors que la Ligue domine Paris, la Bibliothèque du roi manque de peu de connaître le même sort que celle de Charles V. Les ligueurs en forcent l’entrée et l’occupent pendant six mois. Un nouveau garde de la librairie est nommé par le duc de Mayenne, chef des Ligueurs. Peut-être des vols ont-ils été commis alors…
François CLOUET (d’après), Charles IX de France, vers 1563, huile sur toile, Versailles, châteaux de Versailles et de Trianon / Wikimedia Commons
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Sous Henri IV, la Bibliothèque est plusieurs fois déplacée avant d’être installée rue de la Harpe en 1617.
Frans II POURBUS, Buste de Henri IV portant la croix du Saint-Esprit (1553-1610), XVIe-XVIIe siècle, huile sur toile, Versailles, châteaux de Versailles et de Trianon, RMN / Wikimedia Commons.
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En 1666, Colbert l’installe rue Vivienne et entreprend de l'organiser pour en faire un instrument à la gloire de Louis XIV : c’est le début de son véritable développement et de ce qui deviendra le quadrilatère Richelieu. Il accroît grandement les collections, doublant le nombre de manuscrits, en partie grâce à l'envoi d'émissaires royaux en Orient, et quadruplant celui des livres imprimés. Son bibliothécaire, Nicolas Clément met également en place la cotation qui porte son nom et qui perdure aujourd'hui pour certains documents anciens de la BnF.
Philippe DE CHAMPAIGNE, Portrait de Jean-Baptiste Colbert, 1666, huile sur toile, New York, Metropolitan Museum of Arts / Wikimedia Commons.
Hyacinthe RIGAUD, Portrait de L’abbé Jean-Paul Bignon, 1707, estampe, Paris, Bibliothèque nationale de France, Département des Estampes et photographie
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L'abbé Bignon, nommé bibliothécaire du Roi en 1719, lui donne un éclat sans précédent. Se passionnant pour la Bibliothèque, il poursuit son enrichissement mais surtout l’organise en départements (Imprimés, Manuscrits, Médailles et Pierres gravées, Planches gravées et Recueils d’estampes, Titres et Généalogies), et commence à rédiger les premiers grands catalogues. En 1739, on présente au roi le premier volume du catalogue des imprimés, à savoir les lettres A, B, C pour la théologie avec en en-tête un « Mémoire historique ».L’Abbé Brignon rend par ailleurs la Bibliothèque du roi accessible au public pendant trois heures une fois par semaine.
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La Révolution française correspond à un important enrichissement des collections via les nombreux biens confisqués aux ecclésiastiques et aux émigrés. Toutefois, elle supprime le dépôt légal en juillet 1790, avant de le rétablir trois ans plus tard mais de façon facultative, par la loi du 19 juillet 1793 sur le droit d’auteur – il ne sera pleinement restauré qu’en 1810.
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Les conquêtes napoléoniennes enrichissent fortement les collections d’ouvrages provenant de Belgique, d’Allemagne, des Pays-Bas ou d’Italie.
Jacques-Louis DAVID, L’Empereur Napoléon dans son bureau des Tuileries, 1812, huile sur toile, Washington DC, National Gallery of Art / Google Arts Institute.
Jean-Nicolas TRUCHELUT, Henri Labrouste, photographie en buste, 1875, photographie, Paris, Bibliothèque nationale de France, Département des Estampes et photographie
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Au moment de la Restauration, la Bibliothèque ne sait pas exactement ce qu'elle possède, faute de catalogue tenu à jour, et elle manque de place : une réorganisation s’avère nécessaire. En 1858, Napoléon III réunit une commission, sous la direction de Prosper Mérimée, pour étudier les modifications à introduire dans le fonctionnement de la Bibliothèque impériale. Son Rapport est suivi du décret du 14 juillet 1858 qui confie la réorganisation intérieure de l'établissement à l'administrateur Jules-Antoine Taschereau et la reconstruction des bâtiments à l’architecte Henri Labrouste. Dix ans plus tard, en 1868, deux salles de lecture ouvrent au département des imprimés, l'une réservée aux "travailleurs dûment autorisés", et l'autre "absolument publique" "ouverte à tout venant".
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Des séries de dons exceptionnels enrichissent les fonds tout au long de la deuxième moitié du siècle : la collection de vases antiques et de monnaies du duc de Luynes en 1862, les collections de Bure (1854) et Hennin (1863), ou encore les manuscrits de Victor Hugo, legs voulus par l’écrivain en 1881.
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​Entre 1897 et 1905, le médiéviste Léopold Delisle – nommé administrateur général en 1874 – publie plusieurs volumes du Catalogue général des livres imprimés de la Bibliothèque nationale. Il rompt pour cela avec les choix de son prédécesseur et abandonne le système méthodique au profit de l'ordre alphabétique.
M. Lépold Delisle, 1909, photographie, Paris, Bibliothèque nationale de France, Département des Estampes et photographie
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En 1894, la Bibliothèque parvient à acheter les maisons particulières situées à l'angle des rues Vivienne et Colbert qui l'empêchaient jusqu'alors de constituer un quadrilatère autonome. Ces maisons sont rasées et l'architecte Jean-Louis Pascal peut édifier sur cet emplacement une grande salle de lecture dont la destination demeure en suspens. Sera-t-elle une salle d'expositions, une salle publique de lecture, une salle des périodiques ? C'est finalement cette dernière option qui est retenue.
Jean-Louis Pascal, French architect, photographie, in William Carey JONES, Illustrated history of the University of California, 1895, Wikimedia Commons.
CAVALIER James, François Mitterand, President of France, photographie [tronquée], 1984, Wikimedia Commons.
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Au XXe siècle, la Bibliothèque ne cesse de s’agrandir et le nombre de salles de lecture passe de six à onze entre 1930 et 1964. Parallèlement, pour accueillir les collections qui elles aussi ne cessent d’augmenter, trois annexes de conservation sont construites à Versailles en 1934, 1954 et 1971, une à Sablé en 1980 et une autre à Provins en 1981.
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Dans une logique de modernisation perpétuelle, les années 1960 voient le lancement d’une grande campagne de mise sur microformes des collections. C’est également le moment de l’ultime agrandissement du quadrilatère Richelieu avec le département musique installé à l’angle des rues de Richelieu et Louvois.
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Confrontée à ces difficultés nées de la croissance de la production imprimée et de la demande culturelle, la Bibliothèque nationale doit opérer une mutation. Le 14 juillet 1988, lors de son traditionnel entretien télévisé dans le parc de l’Elysée, le Président de la République, François Mitterrand, annonce « la construction et l’aménagement de l’une ou de la plus grande et la plus moderne bibliothèque du monde ». Il n’hésite pas à parler d’une “bibliothèque d'un genre entièrement nouveau". Malgré les évidentes nécessités d’agrandissement et de transformation de la Bibliothèque, ce projet suscite l’inquiétude des personnels de la rue de Richelieu, qui s’interrogent sur le devenir du site Richelieu.
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Les années 1980 correspondent au début de l’ère numérique avec l’arrivée de l’informatique. Dès 1992, la Bibliothèque conserve les documents multimédias, logiciels et bases de données. Mais les efforts de modernisation ne suffisent pas à résoudre les problèmes de stockage dus à l’explosion de la production imprimée comme à l’arrivée de nouveaux supports qui posent des problèmes de conservation. Ces enjeux de conservation sont au coeur du projet du nouvel espace implanté sur le site Tolbiac.
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L’architecte Dominique Perrault est chargé de la construction du nouveau site, nommé François Mitterrand (Tolbiac), qui ouvre en 1996 pour la bibliothèque d’étude du Haut-de-Jardin et en 1998 pour la bibliothèque de recherche du Rez-de-Jardin. La totalité des imprimés de la Bibliothèque nationale, soit dix millions de volumes, y sont alors transférés.
FR3, François Mitterrand inaugure la Bibliothèque Nationale de France, image extraite du journal télévisé (19/20), 30 mars 1995, INA.
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Toujours dans cette logique de modernisation, en 1991, la BnF met en place Gallica, sa bibliothèque numérique. En libre accès depuis 1997, la plateforme regroupe aujourd’hui plus de 5 millions de documents (des livres au format Epub, des journaux, des revues, des images, des enregistrements sonores, des cartes, des manuscrits et des vidéos).